Interlude : au lac du Ronzey.
Dernière sortie avant le confinement. Nous sommes le 27 octobre. Nous voilà partis à trois du groupe jeunes LPO Rhône, direction le lac du Ronzey pour faire un peu de mycologie et de botanique, car si le site est plus ou moins connu pour ses oiseaux, il l'est beaucoup moins pour d'autres taxons. Champignons et herbes folles attirent notre attention. Appareils et guides naturalistes en main, nous voilà a observer les Taraxacum et autres Boletaceae. Il est rattaché à la commune d'Yzeron, connue pour porter le même nom que sa rivière, l'Yzeron, qui passait sous nos fenêtres quand nous habitions Oullins. Encore très fréquenté, le village étaient jusque deans les années 50-60 un site très prisé. Jusqu'à 8 hôtels acceuillaient les visiteurs venus le plus souvent de Lyon ou de grandes villes pour profiter du cadre champêtre offert par ce bastion renommé Montagne-les-Bois pendant la révolution.
Quelques jeunes bolets à chair jaune (Xerocomellus chrysenteron) ont sorti le bout de leur chapeau. Ce dernier n'est pas encore craquelé mais velouté, au contraire de celui des spécimens un peu plus vieux qui se tiennent non loin de là. Piètre comestible, il se reconnaît à ses pores jaunes qui se détachent facilement et a sa chair de la même couleur. Si l'espèce ne prend pas place dans les assiettes, elle s'avère surperbe dans un tapis de mousse.
Toujours aux pieds des cèdres et des épicéas plantés au bord de l'eau pour profiter aux promeneurs les jorus d'été, nous tombons sur une ribambelle de colybies des arbres (Collybia dryophila) un peu fatiguée. Là aussi il s'agit de piètres comestibles. Commune voire abondante sous les peuplements mixtes, l'espèce n'en reste pas moins intérréssante pour son odeur douce particulièrement perceptible après la pluie ou la rosée du matin.
Voici une toute nouvelle espèce pour moi que je peux ajouter à mon tableau de chasse "mycologique".
Je n'avais encore jamais rencontré ce champignon, et si pendant longtemps j'ai pensé à l'hygrophore russule (Hygrophorus russula), je n'en suis pas encore complètement sûre. Néanmoin le pied fort des jeunes specimens, le chapeau couleur lie de vin, les lamelles cireuses ou encore la chair blanche me confortent dans ce choix. Néanmoins je continu de chercher encore, d'autant que le substrat sur lequel pousse ce champignon me met le doute dans l'identification, l'hygrophore russule étant connaître pour pousser plutôt sous els feuillus.
Sur le terrain de foot non loin de là, un drôle de chapeau pointe le bout de son nez. Il s'agit du coprin chevelu (Coprinus comatus). Comestible, et contrairement à ce que dit la légende, on peut tout à fait le consommer avec de l'alcool, à condition qu'il soit bien jeune, sans encre noire et récolté depuis moins de 4 heures.
C'est son cousin le coprin noir d'encre (Coprinopsis atramentaria), pour lequel on ne doit pas consommer d'alcool pendant et 72 heures après un plat de ce coprin pour éviter le dangereux effet antabuse. Pour revenir au coprin chevelu, celui-ci a été victime des pluies des derniers jours et se retrouve démunie de ses mèches. On dit alors que son chapeau est munie d'une cuticule méchuleuse, ce qui lui a valu son épithète de "chevelu".
Les champignons ne sont pas les seuls à avoir pris position du terrain. Un couple de rouge-queue noir (Phoenicurus ochruros) peu farouche semble y trouver son compte. D'ordinaire ces oiseaux sont migrateurs et ne restent pas sous nos lattitudes. Le réchauffement climatique, la modification des habitats et des routes migratoires conduisent à ce phénomène. Bien souvent, les individus restant sur place sont les premiers à occuper les sites de nidifications, mais malnutris, ils doivent la plupart des temps cèder leur place à ceux revenant de migration.
Retour au bord de l'eau. Sous les arbres, une petite colonnie de champignons identifiés comme appartenant au cortinaire jaune canelle (Cortinarius cinnamomeus) se mêlent à d'autres espèces. Ce cortinaire se caractérise par son odeur de rave et/ou d'herbe ainsi que par la couleur canelle de ses lames. La chair jaune tire au vert-jaune chez les individus un peu plus vieux. Il peut être confondu avec plusieurs espèces très proches.
Le laccaire laqué (Laccaria laccata) est un petit champignon roux au pied coriace et au chapeau ne dépassant pas 5 centimètres de diamètres. C'est une espèce très polymorphe, peuvent présenter des aspects variés en fonction des températures et de l'humidité de son environnement, sans parler de ses nombreuses sous-espèces. Pionnier et abondant, il est classé dans les comestibles. Bio accumulateur, il faut en limiter la consomation.
Non loin de là, pousse un groupe de paxilles enroulés (Paxillus involutus), dont le nom vient de sa marge qui s'enroule légérement sur elle même. Ce champignon plutôt commun et massif est toxiue voire mortel, même si dans le passé il a pu être consommé, ce qui est d'ailleurs encore le cas dans certains pays de l'Est. C'est également une espèce bio-accumulatrice, plus particulièrement de métaux lourds.
Sous les sapins, un rond de sorcière se dessine. Celui-ci se compose de clitocybes odorants (Clitocybe odora), une espèce atypique de couleur bleue et à l'odeur surprenante d'anis. Comestible, il est cependant recommandé de le consommer en petite quantité. Très parfumé, il est souvent incorporé dans les poêlées forestières mais aussi, entre les mains de grands chefs, il prend place dans les sels de champignons et dans les glaces !
Il n'y a pas beaucoup d'animaux à voir sur le lac d'Yzeron hormis une quarantaine de colverts (Anas platyrhynchos) barbottent joyeusement au milieu de l'eau. La forte fréquentation du site, la proximité des chemins de la rive et le sentier serpentant dans les herbiers laissent peu de zones de défend. La faune sauvage n'ayant pas d'espace dédié à sa tranquillité, elle a le plus souvent tendance à bouder le site hormis l'été pour s'abreuver.
Fin de l'après-midi, et dernière sortie avant le confinement puis les couvres-feu. À ce moment là nous n'en savons rien mais nous nous en doutons fortement. C'est cependant l'esprit léger que nous partons après avoir gravi la coline boisée qui surplombe le lac. De là, le panorama sur la vallée, l'agglomération lyonnaisse et les pré-Alpes est à couper le souffle. Nous trouverons mêmes quelques lépiotes dans la forêt.