Sortie en montagne 29.
La Charteuse, le Charmant Som ... notre été aura été dédié à ce petit sommet. Cette fois-ci nous ne sommes pas seuls mais accompagnés d'un couple d'amis.
Ce sont amoureux de la nature et de la randonnée, d'ailleurs nous sommes bien loin d'avoir leur niveau. Objectif ? Toujours la grande faune et les rapaces mais cette fois-ci nous sommes plus attirés par les plantes de herbages et de montagne. Comestibles ou non, c'est le bon moment pour partir observer les espèces à la floraison tardive et que l'on prend trop peu souvent le temps de regarder.
Les mouflons méditerranéens (Ovis Orientalis) sont fidèles au poste. Trois femelles en contre-bas broutent tranquillement. À notre arrivée, elles prennent le temps d'évaluer la menace que nous sommes. Nous ne bougeons pas. Doucement, elles s'éloignent du sentier pour partir plus loin. D'ordinaire peu farouches, l'ouverture de la chasse rend nerveux ces animaux introduits localement pour répondre à la demande des A.C.C.A.
Cette fois-ci ce ne sont pas les fleurs jaunes de l'herbe à sous appelée vulnéraire des Chartreux (Hypericum nummularium) qui attire mon attention, mais les jeunes feuilles bien vertes et rondes qui lui ont valu son nom. Endémique des Alpes et des Pyrénées, elle est courante dans les lapiaz, formations rocheuses apparues suite à l'érosion de la pluie et formant des crevasses de pierre débouchant souvent dans des galeries souterraines.
Dans un tapis de myrtilles, un lactaire pousse. Pied orangé, haute altitude et conifères à proximité, on a vite fait de crier au lactaire délicieux. Pourtant il faut bien plus d'éléments pour permettre une bonne identification, car il n'y a pas moins de 6 espèces dans le secteur qui se confondent et qui ne peuvent être déterminées que par leur arbre hôte.
La présence de sapins blancs (Abies alba), d'un sol à tendance calcaire et la période de l'année, ainsi que les motifs sur le peid et le verdissement des chairs permettent de déterminer qu'il s'agit ici du lactaire couleur saumon (Lactarius salmonicolor), un piètre comestible à l'odeur et a ugoût de résineux et qui serait semble-t-il, indigeste chez de nombreuses personnes. Il m'arrive parfois de le consommer mais toujours grillé, souvent sous forme de chips. En prospection je trouve parfois son cousin le lactaire de l'épicéa (Lactarius deterrimus) ayant la même réputation.
En parlant des myrtilles (Vaccinium myrtillus), les voicis. D'ordinaire, c'est une espèce qui se développe sur des sols acides, ce qui explique leur faible nombre et l'état quelques peu défraîchit de certains plants. Connue dans les Ardennes, ou dans le Pilat, la récolte des myrtilles ne fait pas partie des traditions de Chartreuse même si on peut trouver de nombreuses préparations à base de ce petit fruit. La framboise y est bien plus commune.
Belel surprise, au pied d'un gros bloc de roche, une pleurote corne d'abondance (Pleurotus cornucopiae) . Comestible, c'est un champignon qui pousse souvent en groupe.
Poussant sur le bois mort, que cela soit des branches, des troncs ou de souches, il peut devenir rapidement imposant avec un chapeau blanc crème pouvant atteindre comme ici 10 à 12 centimètres. Cependant les gros exemplaires sont souvent coriaces et leur chair est facilement colonisée par les vermisseaux. Il s'identifit aussi via son pied couvert d'un ensemble de réseau brun formé par les lamelles qui se prolongent sur le pied, par sa chair filandreuse à la saveur douce et à l'odeur de farine et à sa forme d'entonoire. Productif, il connaît une importante poussée au printemps puis à l'automne. On le trouve désormais dans le commerce, sa culture étant simple et peu onéreuse, de nombreux cultivars ayant été développés.
Arrivés au sommet, un petit groupe de chocards à bec jaune (Pyrrhocorax graculus) nous rejoignent. Constatent l'absence de pique-nique dans nos sacs et le fait que nous ne comptions pas partager notre casse-dalle d'acension, ils nous abandonne au profit d'une pente herbeuse riche en insectes caprophages suite au passage d'un troupeau de chèvres et au nombreuses bouses des vaches d'alpages pâturant sur le secteur.
Emblème des montagnes, la carline acaule (Carlina acaulis). On ne serait la traiter de chardon, mais reste une proche cousine de ces derniers. Protégée en France, on continue dans certains patelins de l'utiliser pour décor les portes des maisons mais aussi, de consommer les boutons floraux comme on pourrait le faire avec de jeunes artichauts, ce qui ne va pas sans participer à la diminution voire disparition de l'espèce.
Il est temps de descendre dans la plaine, non sans jeter un dernier coup d'oeil au monastère de la Grande Chartreuse et sans avoir fait le plein de Serac à la fromagerie et avoir pris en coulis de framboise de quoi tenir tout l'hiver, n'ayant pas eu la chance de pouvoir partir faire nos récoltes estivales comme nous aimons tant le faire. La prochaine montée sera pour le printemps 2020, quand la chasse sera finie et le manteau neigeux parti.